samedi 25 avril 2020


Précisions sur le rapport complexe entre la question amazighe et la problématique de la démocratie et de développement

Par rapport à ces problématiques centrales liées à la question amazighe et qui préoccupent l’ensemble des acteurs politiques et associatifs du pays, nous devons formuler les précisions d’ordre méthodologique en parfaite symbiose avec les règles et les normes académiquement admises de la sociologie politique et des «sciences» de l’histoire modernes à savoir
- Première précision : Elle concerne plus particulièrement la problématique centrale du passage de l’espace culturel à l’espace politique. Plus précisément, le traitement objectif des questions culturelle et identitaire relatives à l’amazighité pose la nécessité de séparer méthodologiquement l’analyse critique des régime politiques qui ont parrainé jusqu’ici l’amazighité d’une côté, et l’étude rationnelle des paramètres culturels et religieux pour une reconstruction historique et sociologique du patrimoine amazigh de l’autre. En d’autres termes, les défenseurs des droits des Amazighs acquièrent légitimement le droit de relever le caractère totalitaire des régimes politiques arabes (en conformité avec les fondements de la démocratie moderne), comme ils acquièrent le droit de ne pas adhérer aux projets de développement économique et politique adoptés par le pouvoir politique de leur pays (dont ils gardent le droit légitime de critiquer le caractère non démocratique) sans abandonner leur combat pour la défense des droits fondamentaux des Amazighes à l’intérieur et à l’extérieur de leur patrie.
Encore faut il arriver à séparer l’esprit tribal des questions politiques et culturelles à caractère national en ce qui concerne certaines associations amazighes radicales d’un côté, et à renoncer au discours dominant et falsificateur qui définit la nation marocaine exclusivement à partir de l’arrivée d’Idriss Premier sans se soucier de l’histoire et de la culture amazighes présentes au Maghreb antérieurement à la domination arabe de l’autre!.
Nous pouvons affirmer sans détour, que tous les défenseurs des droits culturels et linguistiques amazighs sont attachés sincèrement et dialectiquement à leur patrie, mais sans perdre pour autant le droit légitime de ne pas adhérer aux idéologies qui façonnent les rapports de discrimination et d’exclusion dont souffrent spécifiquement les communautés amazighes, et sans cautionner la reproduction des rapports d’inégalité et de marginalisation dont souffrent les couches pauvres du pays abstraction faite de leur langue maternelle arabe ou amazighe !
- Deuxième précision : Les défenseurs de l’amazighité se trouvent en position tout à fait légitime de ne pas être satisfaits des perspectives officielles de résoudre la question des droits économiques et culturels des Amazighs dans le cadre exclusif de la politique de décentralisation et de «régionalisation avancée» puisque elle ci n’eut connu jusqu’ici que des échecs sans déboucher concrètement sur une prise en compte réelle et concrète des volets culturels, linguistiques et artistiques propres aux ethnies amazighes.
- Troisième précision : Elle concerne la consécration constitutionnelle de la langue amazighe. A ce propos, nous rappelons qu’il ne s’agit pas d’inscrire des orientations en termes de développement, de décentralisation et de régionalisation etc. dans le texte-même de la Constitution pour faire croire à leur relance et à leur mise en application ! (NOTE 1)
Ce ne sont pas des discours et des productions littéraires et législatifs à caractère théorique qui font bouger et réformer les sociétés.
Les Sciences politiques ayant servi d’outils méthodologiques d’élaboration des Constitutions et des différentes institutions démocratiques fonctionnelles en occident (Europe et Etats-Unis en l’occurrence), nous enseignent que la discordance entre l’énonciation constitutionnelle (y compris par un chef d’Etat charismatique et de bonne volonté ) et la mise en œuvre de politique de réformes, constitue durablement un obstacle aux changements structurels et à la mise en œuvre d’une gestion rationnelle de développement, et seule une réelle volonté politique de l’ensemble des acteurs en présence (classe dirigeante, partis politiques, cadres de l’Etat, organisations de la société civile), pourrait permettre de dépasser le caractère théorique de ces énonciations constitutionnelles et juridiques.
A l’instar des questions liées au développement économique et à la formation de la démocratie, la question culturelle amazighe ne sortira pas facilement du cadre théorique et des discours rhétoriques récemment tenus par les élites dirigeantes du pays.
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(NOTE 1) 

Il est à préciser que l’unanimité des observateurs étrangers aient relevé le «changement de cap à 180 degrés» du pouvoir makhzénien suite à l’espoir ressenti de voir le Maroc politique s’engager dans la voie de la modernité, de développement et de la démocratie au début du règne de Mohamed VI. Or les forces obscures aux visions égocentriques, réussirent à faire de la classe dirigeante du pays une nomenklatura soudée autour des lobbys, dont les représentants ne visent qu’à s’accaparer de plus de richesses et à rentabiliser leurs affaires sans se soucier des droits et des attentes du peuple marocain. (Pour plus de détails sur cette dérive totalitaire du Makhzen économique et politique, voir notre étude intitulée : «Le Maroc entre les modes de gestion d’incompétence et les exigences de bonne gouvernance » 

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