mercredi 29 avril 2020

- Conquêtes omeyyades ou les premières tentatives de L’islamisation et de l’arabisation du Maghreb

Trois observations préalables sont à présenter sur le caractère dramatique de la conquête arabe du Maghreb amazigh, à savoir :
- Dans ce cas d’espèce, la dimension religieuse, ou plutôt l’idéologie politique religieuse à coloration islamique (incompatible avec les principes de justice et de tolérance qui furent énoncés dans le Coran) fut un élément central dans le processus de légitimation de l’expansion arabe. Si les motivations sociales, politiques et économiques sont plus importantes, le discours politique qui prônait en premier lieu l’intégration du grand Maghreb à l’espace géostratégique de la Khilafa omeyyade de Damas, fut la condition sine qua non et préalable à toute initiative de paix avec les communautés amazighes.
- Selon des grands spécialistes de l’histoire des conquêtes arabes, et comme nous l’avons évoqué précédemment, les dirigeants militaires et politiques arabes imposaient manu militari aux communautés amazighes l’acquittement d’un lourd tribut («jizya»), et les chefs de tribus berbères qui ne pouvaient honorer le paiement de ce fardeau, se trouvaient tout simplement obligés d’offrir leurs fils ou leurs filles (voire de les vendre) pour qu’ils se convertissent en esclaves pour le compte de la force occupante arabe ;
- Il est à rappeler aussi, que Selon Mohamed Talbi, pour la seule première étape d’occupation de soixante dix ans parrainés par Okba Ibn Nafiâ, Hassan Ibn Nouâman et Moussa Ibn Noussair, au moins quatre cent quinze milles hommes et femmes furent convertis en esclaves pour satisfaire les caprices des dirigeants arabes de Damas.

1°) Okba Ibn Nafiâ (عقبة ابن نافع) :

* Né à l’ère du Prophète , mort en 63H. / 682Gr.,
* Cousin maternel de Amrou ben Alaâss ( عمرو بن العاص ,
Gouverneur de l’Egypte) ; il fut incontestablement le premier personnage de l’orient à tenter à deux reprises de conquérir le Maghreb :
* Occupation d’Elkirawane ( القيروان) ( vers 43H. / 663Gr.), qu’il transforma d’abord comme camp militaire, et puis comme un centre urbain avant de devenir plus tard la capitale de l’occident maghrébin ;
* A l’ère de Othman ben Aâffan (عثمان ابن عفان ) , il participa au côté de Abdellah Ibn Abi Sarh à la grande bataille engagée contre les Romains pour conquérir l’Ifriquia (Tunisie actuelle), avant d’être désigné par Mouâwya معاوية en 50 Hég. à la tête d’une importante armée en Ifriquia, qui lui permit de conquérir par le feu et les armes l’ensemble du Maghreb amazigh.
* En dehors de son ambition reconnue de bâtir que des mosquées sur les terres amazighes, Okba ben Nafiâ demeure l’une des figures despotiques de l’histoire des conquêtes arabes, puisque selon des historiens fiables, il ne tenait vis-à-vis des communautés amazighes que le langage de l’autorité visant exclusivement l’obligation d’intégrer par la force armée le Maghreb à la Khilafa omeyyade de Damas. C’est ce qui explique les malentendus qu’il avait crées avec le célèbre dirigeant amazigh Koussayla au cours d’une première conquête militaire arabe du Maghreb qui lui permit d’occuper Volubilis et de rejoindre les côtes atlantiques du Maroc.
*Après sa destitution par Mouâwya il est de nouveau nommé Wali sur le Maroc par le khalife Yazid – يزيد (successeur de Mouâwya);
* Il rencontra une résistance acharnée de l’armée amazighe dirigée par le célèbre chef militaire d’Afrique du Nord Koussayla ( كسيلة) ;
* Il fut piégé et tué par ce dernier (ainsi que l’ensemble des chefs militaires arabes qui l’accompagnaient) vers 63H./682Gr.

2°)- Hassan ibn Nouâman ( حسن ابن النعما ن )

On reconnait à Hassan Ibn Nouâman la levée des premiers obstacles dressés à l’islamisation grâce à la victoire de son armée sur les Byzantins qui lui permit d’occuper Carthage ( vers 79H/698G ) et d’arracher difficilement et dans une première étape une victoire sur l’armée des Amazighs dirigée par la célèbre chef militaire Addahya ( ALKahina - الكهينة ) ;
Il est à rappeler l’un des épisodes tragiques de la conquête arabe dirigée par Hassan Annouâman : Après une première défaite face à l’armée dirigée par Addahya (697 Gr), il revient à Damas pour demander au Khalife de doter son armée de plus de moyens en hommes et en matériel. A son retour dans l’Aurès, il décida de mettre le feu à la forteresse dressée par Addahya pour protéger son armée dans sa position d’autodéfense face à l’acharnement du chef militaire arabe. Addahya proposa ainsi à Hassan Annouâman de le rencontrer personnellement afin de faire une trêve et épargner la vie des combattants amazighs. A leur rencontre, Hassan Annouâman refusa d’arrêter les combats et décida de l’assassiner tragiquement en lui coupant la tête (NOTE 1) au moyen d’un sabre, en violation des règles déontologiques islamiques relatives à la gestion des guerres (héritées du Prophète et de Abi Bakr Assedik. Telle est l’image paradoxale et sanguinaire que nous livre l’un des dirigeants arabes de la mission islamique d’obédience omeyyade!

3°)- Moussa Ibnou Noussaire et Tarik Ibnou Zyad - موسى ابن نصير -                             (m. 97H./715Gr.) :

Fort de sa grande expérience militaire, il put bénéficier de la confiance du Khalife omeyyade Elwalide ben Abdelmalik - (الوالد ابن عبد المالك)pour réaliser durablement et définitivement la conquête du Maghreb et de l’Andalousie :
*Nommé d’abord wali sur l’Afrique vers 77 Hég., avant d’entamer la conquête d’Elkirawane, de tout le Maghreb et de l’Andalousie ;

* Tarik Ibn Zyad ( طا رق ابن زياد ) :

 En tant que chef amazigh avait franchi le détroit séparant le Maroc et l’Andalousie (qui prendra son nom : Gibraltar- جبل طا رق) sur ordre de Moussa Ibnou Noussaire
En 92H. / 711Gr. , Tarik Ibn Zyad traverse le détroit à la conquête de l’Andalousie à la tête d’une armée de 13000 hommes constituée essentiellement des combattants amazighs.
Moussa Ibnou Noussaire ne voulait pas en réalité prendre le risque d’affronter une armée imprévisible au sud de l’Andalousie, préféra envoyer Tarik Ibn Zyad pour mener les premières conquêtes..
* M. Ibnou Noussaire traversa à son tour le détroit de Gibraltar vers 93H pour rejoindre par la suite Tarik Ibn Zyad.
Après avoir été convoqué à Damas à l’occasion d’un malentendu avec Moussa Ibnou Noussaire, Tarik Ibn Zyad fut piégé à son tour par les dirigeants arabes et disparait à jamais sans laisser de traces ! Il s’agit d’une autre tragédie de l’histoire sanguinaire omeyyade qui suivit l’assassinat ignoble de la chef militaire Addahya par Hassan Annouâman !.
Encore un épisode hautement tragique de la conquête arabe : Des historiens spécialistes du Maghreb ont rapporté que Moussa Ibnou Noussaire, avait exigé secrètement de son armée la mise à mort des dizaines de milliers de personnes parmi les populations amazighes avant de s’engager dans une bataille contre leur armée. Le but : valoriser son image vis-à-vis du Khalife et provoquer préalablement une frayeur au sein des combattants désignés comme «ennemis» au temps de la «mission civilisationnelle arabe» !!!!
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NOTE 1

(1) A tire de rappel, Abi Bakr Assedik confiait à chacun des chefs militaires une lettre portant des recommandations significatives et précises sur la gestion des guerres et les règles de traitement des prisonniers dans un esprit de tolérance, de respect de la population civile et des lieux de culte. Leur application fut recommandée et définie par Abi Bakr suivant les principes suivants :
*Toute rencontre avec une armée adverse devrait donner lieu à une proposition préalable de paix. L’engagement d’une confrontation militaire ne constituerait qu’un dernier recours ;
* La confrontation ne pourrait en aucun cas générer la destruction des lieux de culte , en l’occurrence les églises et les synagogues et la violation de la liberté et de l’intégrité des hommes, des femmes et de la foi non musulmane.
* Toute confrontation devait épargner et protéger les femmes et les enfants ;
* Les prisonniers de guerre devaient être soignés et ne devaient subir ni humiliation ni mauvais traitement ;
* la condition sine qua non pour la conclusion de la paix avec les non musulmans (que l’armée islamique ne pourrait en aucun cas obliger d’adhérer à la nouvelle religion en terre d’islam) fut l’acquittement d’une sorte d’impôt dit : « aljizya-الجزية- » , qui leur garantirait le bénéfice des mêmes droits sociaux et politiques que les citoyens musulmans au sein de la communauté islamique
Or les communautés amazighes et leur armée ne menaçaient en aucun cas le jeune Etat musulman dont la capitale se trouvait à Damas, et Hassan Annouâman n’avait aucune raison légitime d’user de la force contre des paisibles communautés amazighes qui se trouvaient dans la position d’autodéfense face à une armée qui ne visait que leur défaite ou la mise à mort !

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