Par rapport à la période pré-coloniale :

Sur le plan méthodologique, cette introduction (renvoyant aux autres ETUDES intégrées à notre site encyclopédique -QUINTESSENCE - CONNAISSANCE -TOLERANCE) se propose de contribuer à la « correction » des lectures dogmatique et obscurantiste de l’Histoire du Maroc, pour une appréciation de l’ «essence de l’édifice social» au-delà donc de l’historicisme et de l’empirisme .
L’importance que prend l’analyse théorique dans cette étude (supposant une délimitation du champ historique qui renvoie à un double niveau de formation sociale d’une part, et du procès d’articulation de cette formation sociale avec le capitalisme de l’autre part, nous conduit nécessairement à définir préalablement les conditions méthodologiques et les concepts opératoires » qui nous serviront de base et de fondement à «l’analyse concrète d’une société concrète». Partir de la réalité concrète et des «éléments simples », avant de s’élever vers les «concepts les plus complexes», des classe », de l’Etat… La méthode dialectique ne se limite pas au « concret figuré», (la réalité comme produit de la pensée ), elle va jusqu’au concret qui est le résultat de l’investigation scientifique, comme «reproduction du concret par la voie de la pensée » .

Par rapport à la lente transition pré-capitaliste, l’internationalisation des rapports marchands avait provoqué une crise des anciens équilibres régionaux, l’intrusion du capitalisme au Maroc, n’avait pas opéré des changements qualitatifs au niveau du mode de production… C’est une étape charnière entre une décadence interne qui s’était installée depuis le XVIe siècle, et la transition périphérique qui conduira le Maroc au « sous-développement », suivant cette fois les formes de régulation du capitalisme dans la phase de l’internationalisation des rapports de production capitalistes. L’analyse de l’intégration de la formation économique marocaine dans le marché mondial, marque le passage d’une analyse placée au niveau de la formation sociale, à une analyse située au niveau de l’économie internationale . 

·Au cours de la colonisation jusqu’à la veille de l’indépendance :

Se sont paradoxalement les classes aristocratiques qui se sont enrichies au cours de la colonisation parallèlement aux colons français, qui se trouvent en position d’acquérir les biens et les richesses qui seront abandonnés par ces derniers, alors que les représentants du mouvement national et les communautés paysannes qui n’ont jamais cessé de participer activement à la résistance, se trouvèrent tout simplement exclus de la gestion politique et économique de la nation qui venait d’accéder à l’ indépendance.
Les alliances de classes qui détenaient le pouvoir économique (bourgeoisie compradore et grand propriétaires fonciers) qui voyaient leur richesse et leur statut sociopolitique se consolider avec l’avènement de l’indépendance autour d’une nouvelle entité étatique sans compétence , et sans vision de modèle de développement durable et sans maîtrise des sciences sociales modernes.

·Après l’indépendance :

L’absence d’un modèle de développement autocentré et le choix politique majeur axé sur l’ouverture sur l’extérieur et l’option libérale de l’économie définis par la classe politique dominante au début des années 1960 suite à l’abandon des projets ambitieux de réformes prévus au plan quinquennal (élaboré par les représentants du Mouvement National en 1959 combinant politique sociale, formation accélérée des cadres, industries «industrialisantes» de base et réforme agraire en accord avec les initiatives de développement qui avaient été conçues et élaborées par Abderrahim Bouâbid et Mahdi Ben Barka), ont conduit inéluctablement au développement de sous-développement dépendant et aux imperfections d’ordre social, économique et financier ( à caractère structurel ) suivantes :
-L’enfermement de l’économie marocaine dans la spirale de la gestion de «non-croissance » et de «désinvestissement», qui se combine aux retombées financières de la forte poussée démographique, de la récupération du Sahara et de la gestion de faillite des déséquilibres financiers ( intérieur et extérieur) et de la dette extérieure..
-Contraintes des déséquilibres financiers permanents ayant nécessité une gestion qui visait en priorité le retour des équilibres financiers et l’instauration des politiques budgétaires d’austérité au détriment de l’investissement et de la croissance économique ;
-La combinaison des deux handicaps structurels qui se complètent avec l’hypertrophie du secteur informel, nous met dans la certitude de déduire (à l’encontre des statistiques officielles ) que le taux de croissance tournait en permanence autour de zéro au lieu des taux prévus dans différentes programmes annuels des différents gouvernements !!
-Permanence d’une forte dette extérieure qui s’est accompagnée d’une gestion gouvernementale déficiente, aggravée (délibérément ou par incompétence) par le recours à l’extérieur pour financer le déficit et couvrir les lourds frais de fonctionnement et d’entretien de l’Etat !
-Dépendance extérieur permanente, particulièrement en matière d’importation des biens d’équipement, des produits énergétiques et alimentaires ;
-Forte poussée démographique, et ses retombées en matière de charges sociales et économiques extrêmement pesantes sur les finances de l’Etat : santé, éducation, équipements sociaux, subventions de la Caisse de Compensation etc.;
La gestion technophile et le modèle libéral de l’économie n’ont conduit en réalité qu’à l’enfermement du pays dans la spirale de la dépendance technologique, des déficits financiers, des contraintes budgétaires permanentes, des retombées financières de l’expansion démographique, des lourdes charges de fonctionnement et du coût élevé du service de la dette, obligeant l’Etat à abandonner son rôle primordial de protecteur social ( Etat-Providence) et d’instigateur de développement durable qui se combine au rôle asphyxiant d’un système bancaire fondamentalement usuraire et sans rôle social et aux effets paralysants des lobbys économiques, tout en le mettant dans l’incapacité d’innover une véritable politique d’investissement et de croissance !
Le constat politique et économique amère de l’état de sous-développement de la société marocaine d’aujourd’hui et la gestion à caractère technophile sans référence à un réel et ambitieux modèle théorique de développement et de maîtrise technologique adoptée par les différents gouvernements depuis l’indépendance, posent la nécessité absolue pour les dirigeants futurs d’opérer des changements structurels qui permettraient à notre pays de se mettre à niveau au moins par rapport aux options de développement, aux techniques de gestion économique hautement perfectionnées et de l’intégration rationnelle des compétences nationales et internationales initiées par les pays dits émergents à l’ère de la mondialisation économique et de la globalisation financière.
Nous insistons dans la présente étude sur les aspects les plus sombres de la société marocaine qui forment des obstacles structurels au développement et à la réalisation de l’épanouissement et du bienêtre du peuple marocain, et qui s’expliquent par l’échec du modèle pseudo-libéral et des politiques économiques adoptés depuis les années 1960, sans référence aux orientations théoriques des grandes Ecoles de pensée économique et sans perspectives de réformes structurelles, en rappelant le constat politique et économique suivant :

le Maroc ne souffre donc pas que des imperfections de la gestion dépassée des pouvoirs publics, mais aussi de la nature bureaucratique des partis politiques en présence (qui continuent en permanence d’exclure les compétences nationales sans être capables de fournir des cadres dynamiques et efficaces à une éventuelle majorité politique et à l’institution du gouvernement qui lui permettraient de jouer son rôle d’’instigateur de développement) .
Comme il est handicapé par le caractère égocentriste (et non soucieux de la préservation des intérêts supérieurs de la nation) d’une classe dominante affiliée au pouvoir politique central, qui interdit par le biais de sa mainmise sur les lobbys (économique, commercial, financier, agro-alimentaire, foncier etc. ) toute option de réformes structurelles susceptibles de répondre aux besoins essentiels des larges couches de la population, de relever les défis de développement et d’élever le pays au moins au rang des pays émergents à l’ère de la mondialisation économique accélérée et des nouvelles révolutions technologiques…
Tels sont les trois volets de la spirale politico-économique ( bureaucratie des partis politiques, faiblesse de l’institution du gouvernement, égocentrisme de la classe économique dominante) dans laquelle s’est enfermée la société marocaine, sans que leurs représentants ne voient à l’horizon ce qui se dessine comme Nouvelle Division Internationale dès la fin du 20ème siècle, formée en :
-Pays intégrés rationnellement et efficacement à la mondialisation économique, technologique et écologique ( anciens pays industriels et pays émergents).
-Pays simples consommateurs de produits intermédiaires sans perspectives de développement et sans maîtrise des révolutions scientifique et technique ( le quart-monde).
Depuis le début de l’indépendance, le Maroc n’a enregistré que des échecs flagrants et gravissimes en matière de formation d’une «majorité politique législative», susceptible de refléter la volonté du peuple et de répondre aux attentes et aux besoins des couches moyennes et pauvres du pays. 

L’accès à la responsabilité politique du pouvoir exécutif n’eut été « confectionné » qu’en parfaite symbiose avec des arrangements d’intérêts étroits et partisans) , sans se soucier des critères de développement durable, de relance de la croissance, de conception des conditions technologiques de création de richesses, de la dynamisation des investissements, et d’élaboration de réel modèle de développement économique et d’ambitieux programmes de recherches, susceptibles de relever les défis de la mondialisation économique et de la globalisation financière.. !
Seuls des partis minoritaires et incompétents ( en raison du caractère bureaucratique de leur organisation interne et de l’absence de l’ouverture aux compétences nationales), eurent été désignés ( du haut de la pyramide du pouvoir pour gérer d’une manière technophile les affaires générales du pays .
La consolidation de la démocratie passe avant tout par une réforme approfondie des partis politiques en tant qu’acteurs dynamiques et producteurs rationnels des élites dirigeantes compétentes du pays.
Les réformes des partis politiques exigent au préalable :
-le dépassement de l’étroitesse de l’esprit partisan et la consolidation d’une formation axée sur le civisme, la primauté à la défense des intérêts supérieurs de la nation et le recensement des compétences dans divers domaines de connaissances en rapport avec la formation de la démocratie et le développement économique du pays ;
-la consolidation de la démocratie interne ;
-la lutte contre le sectarisme et la nature bureaucratique de leur organisation interne en vue du renouvellement de leurs cadres dirigeants.
Avec le handicap majeur de l’incapacité structurelle des partis politiques de fournir les cadres doués de compétence à une majorité politique dynamique et efficace, qui s’ajoute à la limite gravissime des attributions constitutionnelles et politiques du gouvernement qui souffre en permanence des contraintes budgétaires qui l’empêchent de réaliser les objectifs prévisionnels fixés, et de répondre aux attentes du peuple marocain , « la boucle est bouclée », et toute initiative de réformes structurelles susceptibles de placer le pays parmi les nations les plus développées ou en l’élevant au moins au rang des «pays émergents» à l’ère de la mondialisation économique accélérée de ce début du 21ème  siècle, est théoriquement ajournée, voire impossible à réaliser !
Pour cela nous nous permettons de lancer un bulletin d’alerte par lequel nous essayerons d’attirer l’attention de la classe politique marocaine (en l’occurrence la Majorité politique qui formerait le prochain gouvernement) sur le risque gravissime qui pèse lourdement aujourd’hui sur notre pays ( chargé d’histoire et plein de vitalité de sa jeunesse) de ne pas se présenter ( à l’instar des pays émergents) au rendez-vous des révolutions technologiques(a), de l’intégration rationnelle et maîtrisée à la mondialisation économique accélérée, de l’investissement dans le savoir et de la mise en œuvre des politiques de développement durable qui s’annoncent pour le 21ème siècle. Ces orientations et ces objectifs ne représentent rien d’autres que le monde nouvellement crée prônant la bonne gouvernance, la compétition à la compétence et à l’excellence. 

Il s’agit de tracer pour notre pays une trajectoire méthodologique de développement qui suppose un programme ambitieux de réformes fondé sur des politiques d’investissement hautement productif, le développement des compétences, la création d’institutions de bonne gouvernance, la redynamisation de l’intégration régionale et internationale, en vue de bénéficier du «rééquilibrage de la puissance économique mondiale» ( en faveur des pays émergents) qui s’annonce à l’ère de la mondialisation .
Il s’agit de promouvoir des «technologies de compétence» bien ciblées génératrices de valeur et de richesse, à l’instar des choix opérationnels de développement et de maîtrise réelle des technologies avancées qui ont engendré la montée en puissance des pays émergents ( la Chine, le Brésil, l’Inde, l’Indonésie, le Mexique) et des «quatre dragons» de l’Asie (Corée du Sud, Taiwan, Hong-Kong, Singapour) ; les dépenses en Recherches et Développement doivent dépasser les 3% du PIB, si le pays aspire à rattraper le retard et à élever le secteur productif au niveau atteint par les pays émergents.
Compte tenu des récences données fournies par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en matière d’évaluation de l’ensemble des critères qui définissent globalement l’I.D.H.- Indicateur de Développement Humain, classant ainsi le Maroc au 130ème rang mondial en 2012, et des appréciations des Institutions financières internationales ( en l’occurrence le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale), les responsables politiques de la majorité future doivent nécessairement gérer l’économie sur la base d’un taux de croissance quasiment constante et ininterrompue de 7% d’ici 2025, pour réduire la pauvreté, faire reculer le chômage et la marginalisation des jeunes, remédier aux déficits budgétaires et au fardeau de la dette qui pèsent lourdement sur le développement du pays.